CE QUE LA COMMÉMORATION DU D-DAY PERMET DE RAPPELER AUJOURD’HUI

En ce premier jour de commémoration du 80e anniversaire du D-Day auquel participe entre autres Joe Biden, président des États-Unis, Women eLife a été sidéré d’apprendre par une dépêche de l’AFP que les femmes journalistes chevronnées, photographes émérites, et reporters, dépêchées à l’époque sur les sites du débarquement, ont dû livrer un combat contre le sexisme.

Le matin du 6 juin 1944, Martha Gellhorn (photo), une journaliste américaine, apprenait, comme d’autres journalistes en poste à Londres, le lancement de l’opération « Overlord » en Normandie.

Elle se précipite alors aussitôt sur la côte, avec l’espoir d’embarquer sur un navire. Or, le SHAEF, le QG militaire des Alliés, interdit strictement aux femmes reporters de s’approcher du front, seuls les hommes, étant autorisés à rejoindre les troupes.
Pour contrer l’interdiction faite aux femmes journalistes de couvrir l’évènement, la journaliste américaine déjouera les contrôles militaires en prétendant être une infirmière de la Croix-Rouge.

Caroline Moorehead, sa biographe, autrice de « Martha Gellhorn, une vie », explique que Martha semble avoir été la seule femme journaliste à avoir pu accoster sur les plages de Normandie.
Toutefois, la reporter paiera son « intrépidité » dès son retour à Londres, puisque le SHAEF l’arrêtera et lui interdira de revenir en Normandie.

Il en sera de même pour Lee Carson, également journaliste américaine, qui parvenue à convaincre un pilote de chasse de la faire survoler les plages normandes, réalisera une exceptionnelle vue aérienne du Débarquement. Elle sera également convoquée en conseil disciplinaire avant de s’enfuir. D’ailleurs, l’Americain Air Museum lui rend hommage en la décrivant comme « la plus jolie » des journalistes.

Photographe de renom pour le Vogue britannique, Lee Miller, fût pour sa part présente à Saint-Malo alors que la cité bretonne, aux mains des Allemands, était sur le point de tomber, en août 1944.
Ses photos de la ville dévastée feront le tour du monde, mais pour la punir, l’armée l’assignera à résidence, relate auprès de l’AFP son fils, Antony Penrose.

Aujourd’hui, lorsqu’on sait combien de femmes couvrent au péril de leur vie, les guerres partout à travers le monde, on s’interroge sur le sexisme idiot qui a prévalu à l’époque.

Mais, Denis Ruellan, historien du journalisme explique cette situation pour la raison suivante : « L’armée avait alors une peur viscérale qu’une femme journaliste meure au front, estimant que cela signifiait que les hommes avaient failli à la protéger ».

Il précise que les femmes reporters ont « souvent dû désobéir, lutter contre l’ordre moral incarné par des généraux, des commandants: toujours des hommes. »
Le sexisme fût l’un de leurs principaux obstacles, rappelle-t-il avant d’ajouter : « L’armée assurait que les soldats seraient perturbés par la présence des femmes reporters, ce qui revenait à les sexualiser. »

Force est de constater qu’en ces temps là, leurs collègues masculins, n’hésitaient pas à leur mettre des bâtons dans les roues. Tel fût le cas de Ernest Hemingway, écrivain et journaliste, qui ne verra les combats du D-Day que de très loin, contrairement à sa femme Martha Gellhorn qui se rendra sur place pour son magazine.

Malgré les difficultés auxquelles elles se heurtent, les femmes reporters parviendront à décrocher des informations exclusives des scoops, faisant enrager leurs camarades.

Pour autant, certains déplorent que le nom de ces grandes journalistes ait été oublié.
Car, à la fin de la seconde guerre mondiale, si les hommes journalistes sont rentrés triomphants, et ont connu des carrières prestigieuses, les femmes ont souvent été reléguées à des tâches secondaires.
D’autres observateurs font valoir que la plupart sont rentrées « traumatisées par ce qu’elles avaient vu et ont quitté le journalisme pour quitter la guerre. »

Mais, depuis la guerre du Vietnam, et plus récemment avec la guerre en Ukraine, mais aussi entre autres au Moyen-Orient et au Proche-Orient, des femmes journalistes, photographes et reporters, assurent par leur présence en zone de conflits armés, avec le même professionnalisme et la même détermination leur mission d’information.

Cette parenthèse se devait de figurer en bonne place dans un magazine féminin indépendant ouvert sur le monde sans tabou, à l’heure du 80e anniversaire du D-Day au parfum de liberté !

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