« ADIEU LE FLAMBANT NEUF, BONJOUR LE FLAMBANT VIEUX » DIXIT JEAN-PAUL GAULTIER

En tirant hier soir sa révérence, lors de son dernier grand fashion show au Théâtre du Chatelet, « ADIEU LE FLAMBANT NEUF, BONJOUR LE FLAMBANT VIEUX » est l’un des messages clés que Jean-Paul Gaultier, figure incontournable dans le monde de la couture au niveau mondial a voulu laisser.

Un message raisonnable et encourageant à l’heure où les légitimes préoccupations environnementales qui touchent le secteur de la mode vestimentaire*, se taillent la part du lion.

Ce grand couturier qui a su au cours de ses 50 ans de carrière révolutionner l’univers de la mode masculine et féminine , avait d’ailleurs annoncé en 2018 renoncer à la fourrure pour ses collections.

Après avoir révélé d’indéniables dons artistiques en démontrant le possible mélange des genres, des sexes, des époques, de la gouaille des rues populaires et de la distinction des beaux quartiers : rappeuses chics, geishas délurées, cocottes corsetées et mâles en jupe et talons hauts, Jean Paul Gautier n’a pas hésité à déclarer :
« Il y a trop de vêtements, ne les jetez pas, recyclez-les »

Cette parole d’un créateur de génie connu pour avoir bousculé les codes vestimentaires dans les années 1980, au point d’être qualifié d’iconoclaste, avant d’avoir été l’auteur de créations devenues cultes comme le bustier à bonnets coniques porté par Madonna, ou son célèbre pull marin et ses marinières, apporte le témoignage d’une authentique ouverture d’esprit.

Une petite annonce qu’il avait passée dans le journal Libération dans les années 1980, « Créateur non conforme cherche mannequins atypiques. Gueules cassées ne pas s’abstenir. » illustrait déjà le caractère iconoclaste de sa démarche.

En créant dés 1984, des jupes pour hommes, il défend l’idée selon laquelle « un homme ne porte pas sa masculinité sur ses vêtements, sa virilité est dans sa tête ».

Il s’impose également comme l’une des figures du luxe français grâce notamment au lancement de sa ligne de parfums en 1991.

Jean Paul Gautier est l’un des premiers à avoir fait défiler des mannequins seniors et des femmes en surpoids ou tatouées.

En juillet 2014, lors de la semaine de la mode à Paris, il invite la drag-queen barbue Conchita Wurst, gagnante de l’Eurovision à défiler ainsi qu’une femme enceinte dans une robe de mariée.
Fils de comptable, ayant grandi à Arcueil (Val-de-Marne), près de Paris, il doit à sa grand-mère esthéticienne, de l’avoir initié tout petit à la couture.
C’est en se souvenant d’elle « qui l’habillait en bleu » que naît son célèbre pull marin et ses marinières qui deviendront fashion, jusqu’à être portés par Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif.

Il s’est aussi fait connaître par ses costumes marquants dans plusieurs films, notamment Le Cinquième Elément (1997), de Luc Besson, et les films de Pedro Almodovar, Kika (1993), La Mauvaise Education (2004) ou La piel que habito (2011).

En 2003, son arrivée chez Hermès, jusque-là temple officiel du luxe classique et discret, l’amène à bousculer le milieu de la mode en donnant un sérieux coup de jeune aux collections à travers des notes de fantaisie et de fraîcheur, dans le respect des codes de la marque.

Très pop culture, il joue son propre rôle dans le film Prêt-à-porter, de Robert Altman, et, avec Antoine de Caunes, il a animé l’émission britannique « Eurotrash ». Il crée aussi des costumes pour de nombreux spectacles de danse, dont le célèbre Le Défilé (1985) de la chorégraphe Régine Chopions.

Jean-Paul Gaultier est bien l’un de ces formidables personnages d’un univers en quête de renouvellement permanent qui devra puiser son inspiration dans de ce qu’il a lui même appliqué, notamment en sachant redonner vie à de vieux jeans, en coupant dans tous les sens des tenues de camouflage.
D’après lui: « recycler pour changer » est désormais la règle à suivre.

Autrement dit, l’adieu au flambant neuf et le bonjour au flambant vieux, a bien valeur de doctrine visant à préserver un mode de développement fashion toujours dans l’air du temps qui se doit de continuer à en découdre en respectant tout l’univers.

* Avec 2 milliards de tonnes de gaz à effet de serre émis chaque année, soit plus que les vols internationaux et le trafic maritime réunis, l’industrie textile est la deuxième industrie la plus polluante au monde après celle du pétrole.
On comprend qu’au vu d’un chiffre d’affaires mondial de l’ordre de 276 à 281 milliards d’euros et une croissance de l’ordre de 8 % en 2019, les grands acteurs du luxe dont les productions font largement appel à cette filière pour créer et vêtir, s’intéressent aux solutions susceptibles de répondre au défi environnemental qui leur est lancé.

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